L’écrivain africain Seydou Badian Kouyaté dont l’œuvre Sous l’orage, parue en 1957 berce des générations d’écoliers africains, s’est éteint ce 28 décembre 2018, il était âgé de 90 ans. Seydou Badian, auteur d’une grande œuvre publiée de 1957 à 2007, avait également écrit l’Hymne National du Mali.

Seydou Badian K. aura passé plusieurs années de sa vie en prison.

Retour au pays des commencements

C’est dans le vent des écritures africaines des années 50 que Seydou Badian fait son apparition sur la scène littéraire. Il a alors 29 ans, et revient de L’Université de Montpellier où il vient d’achever une thèse de doctorat en médecine. Un an après son retour au pays natal, Seydou Badian publie son premier livre, Sous l’orage, nous sommes en 1957. Comme beaucoup d’œuvres de cette période, l’intrigue de Sous l’orage est celle du conflit, tel qu’on voit chez des écrivains découvrant l’Europe et observant l’Afrique se tordre au rythme des changements.

Revenu au pays avant l’Indépendance du Mali, l’enfant prodigue de Bamako, qui est très proche du premier président, père de l’Indépendance du Mali, Modibo Keïta, va écrire l’œuvre la plus importante de l’histoire littéraire de son pays : Seydou Badian Kouyaté écrit alors les paroles de l’Hymne nationale du Mali, « Le Mali ».  Il occupe ensuite des fonctions politiques de divers niveaux dans son pays.

L’écrivain, la république et la prison

Le 19 novembre 1968, moins d’une décennie après l’Indépendance du Mali, le lieutenant Moussa Traoré provoque un coup d’État et renverse la République. L’écrivain, le président Keita et une quarantaine d’autres personnes sont déportés dans un camp militaire à Kidal et dans d’autres prisons. C’est dans les fers du geôle et la froideur carcérale, que l’auteur de Sous l’orage rédige Le sang des masques, un livre qui parait chez Robert Laffont en 1976, et même Noces sacrés que publiera Présence africaine en 1997. Seydou Badian Kouyaté est libéré en 1975, après huit années de prison, pour cause de maladie – le panafricaniste président Modibo Keita avec qui il avait cheminé n’aura pas la même chance, lui qui s’éteint dans les murs de la prison, au cours des circonstances inexpliquées, en mai 1977.

Sorti de prison, l’écrivain va s’exiler en France, mais sera rapidement invité à s’installer au Sénégal, sur l’invitation du président-poète Senghor.  A Dakar, Seydou Badian passera une partie importante de sa vie.

Le combat politique

Seydou Badian est panafricaine. C’est un idéal qui s’explique facilement lorsqu’on connaît sa proximité avec Modibo Keita, ami de Kwame Nkrumah. Le vent des revendications populaires des années 90 n’épargne, en Afrique francophone, aucune dictature. Ne tenant plus sous ses jambes, le régime de Moussa Traoré tremble devant les grèves syndicales et estudiantines des années de 1991. Moussa Traoré chute, après plus de deux décennies de règne. La fin du régime sanguinaire et dictatorial de Moussa Traoré  en 1991, occasionne le retour des exilés à l’intérieur du Mali.  C’est en cette année de grâce que Seydou Badian quitte le Sénégal et retourne au bercail, pour s’engager politiquement.

Comme Mongo Béti, Seydou Badian tente, dès son retour, de s’impliquer dans la vie politique de son pays, mais le climat est encore très improbable et flou. Il retire finalement sa candidature à l’élection présidentielle de 1997, jugeant incompétente l’organisation desdites élections. L’année suivante, en 1998, l’écrivain sera exclu du parti politique dans lequel il avait été militant de la première heure.

En 2007, Seydou Badian a publié un dernier roman, La Saison des pièges aux Nouvelles éditions ivoiriennes, coédité par Présence africaine.

L’homme qui s’est éteint ce 28 décembre à Bamako est un monument. Il représentait jusque-là, avec Bernard B. Dadié, les foyers solides sur lesquels s’est construite la littérature africaine.

Raoul Djimeli

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