Mercredi, 6 juin 2018 s’est tenue à la salle des spectacles de l’université de Dschang une Journée d’étude consacrée à l’écrivain sénégalais. C’était un moyen pour l’Équipe de Recherche en Littérature Comparée (ERLIC) de rendre un vibrant hommage à cette icône de la littérature et du cinéma africain. Cérémonie entre littérature et cinéma, la journée d’étude a donné lieu à une ballade historique sur l’ensemble de la production de Sembène.
Sur le pan littéraire, notes de lecture et articles scientifiques ont permis de revisiter les œuvres comme Le Mandat, Les Bouts de bois de dieu, Xala, Le Dernier de l’Empire. Ces œuvres, d’une extrême richesse, ont été explorées sur divers pans. Alors que Basile Difouo nous pousse à revisiter l’intrigue de Le Mandat en nous faisant revivre les turpitudes de Mamadou Dieng dans toutes les démarches entreprises pour rentrer en possession de son fameux mandat venu de France à hauteur de 25000 frs, Joël Meli, lui, propose une note de lecture de Xala . Ici, l’auteur plonge le lecteur dans l’univers d’El Hadji Abdou Kader Bèye, polygame, victime d’un sortilège, le « xala » qui le rend incapable d’assumer ses responsabilités tant au lit qu’à l’entreprise familiale.
Chantal Bonono, à travers son article, a vu en Les Bouts de bois de dieu, une lecture de l’impact du pouvoir féminin. Elle constate que si au début de la grève les femmes sont muettes, elles vont s’impliquer lorsque survint le désir de trouver à manger à leurs enfants. Amenée par le leader de la révolution Penda, la grève se soldera par la victoire des femmes qui voient du même coup une reconsidération de leur statut. Dans « L’écriture des traces dans Le Mandat », Ngetcham propose une lecture archéologique qui prend le texte comme un site de fouille qui permet de trouver des traces anciennes afin de reconstruire l’histoire. À travers les personnages, les objets et les influences intermédiales, il remonte au passé pour observer l’évolution des schèmes mentaux d’un peuple, les traces d’un discours hybride afin de faire une projection sur l’avenir. Ngapout dans son article s’est intéressé aux jeux et enjeux du pouvoir observables dans Le Dernier de l’Empire. Pour lui, ce roman politique a pour visée l’appel à la prise de conscience d’une élite africaine responsable et soucieuse du bien-être de son peuple.
Sur le pan cinématographique, la cérémonie a vu la projection du documentaire de Samba Gadjigo, documentaire relatant sa rencontre avec Sembène Ousmane. Par la suite, il y a eu la projection du film Ceddo, réalisé par Sembène ; film anti-islam, qui a été interdit au Sénégal et en France. Au final, ce tour d’horizon a permis de constater que la production de l’écrivain dégage une extrême richesse et aborde une diversité de thèmes en poussant à une réflexion de l’Africain acteur de sa propre histoire. Ce qui provoque des réactions multiformes auprès de ses lecteurs qui ne se lasseront de s’y délecter.
Par Mouhamadou Ngapout